Porteuse d’attentes au vu des événements récents ayant provoqué une libération de la parole sur les agressions sexuelles, la loi Schiappa, du nom de la secrétaire d’État à l’égalité femmes-hommes, est actuellement débattue à l’assemblé. Celle-ci a pour but initial de lutter contre le harcèlement, les agressions et les viols, notamment envers les mineurs, mais son article 2 crée la polémique : loin des attentes concernant la création d’une présomption de non-consentement, celui-ci la nuance seulement et instaure également le risque d’une correctionnalisation de ces affaires de viols. Pour contester cet article, une lettre regroupant plus de 250 signataires et une pétition ont été mises en place. Retour sur cette loi aujourd’hui controversée pour mieux comprendre ce débat politique qui agite la France.

La question du consentement

En février dernier, l’affaire avait fait grand bruit : Sarah*, une enfant de 11 ans, avait eu des relations sexuelles avec un homme de 28 ans, sans subir de violences physiques, mais avait expliqué avoir ressenti une forte pression psychologique et n’avoir pas su agir pour empêcher cela. Le tribunal avait alors peiné à établir le consentement de la jeune fille et n’avait retenu que le délit d’« atteinte sexuelle », provoquant un débat sur la notion de consentement. C’est à ce problème que devait répondre la loi Schiappa, censée « renforcer la répression des infractions sexuelles sur mineurs ». Il était au départ question de créer une présomption de non-consentement : toutes les relations sexuelles entre une personne de moins de 15 ans et un majeur auraient alors été considérées automatiquement comme des viols. Mais la loi ne reprend finalement pas cette idée, jugée inconstitutionnelle par l’état. Elle prend finalement cette forme : « la contrainte morale ou la surprise peuvent résulter de l’abus de l’ignorance de la victime ne disposant pas de la maturité ou du discernement nécessaire », et contrainte et surprise sont des notions « caractérisées par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour consentir à ces actes ». Même si le texte permet d’affiner cette question et de donner au juge un texte plus précis sur la question du consentement, il appartiendra donc toujours au parquet de trancher la question.

Un risque de correctionnalisation des viols accrus

Autre reproche fait à ce texte : le risque d’une correctionnalisation des viols. Deux raisons expliquent ce phénomène : le premier est qu’il définit le délit d’atteinte sexuelle par la pénétration, un critère qui était jusqu’ici réservé à la qualification de viol. Ce qui aurait été jusqu’à là considéré comme un viol et donc un crime pourrait donc être jugé bientôt comme une atteinte sexuelle : un délit. Qui plus est, l’augmentation de la peine de cinq a dix ans de prison pour atteinte sexuelle pourrait encourager les juges à poursuivre les accusées pour atteinte sexuelle. Finalement, derrière un apparent durcissement des peines se cacherait en fait un texte manquant son propos et permettant de considérer des viols comme de simples délits jugeables hors des assises.

Alors que la loi Schiappa est débattue à l’assemblé, la société civile s’inquiète. Au travers une pétition et d’une lettre ouverte, ceux-ci souhaitent attirer l’attention sur ce point qu’ils considèrent comme une erreur passant à côté des buts premiers de cette loi. Ils demandent notamment le retrait de cet article 2 sujet à débat.

 Source vidéo : chaîne La Maison des Maternelles et Le Groupe F
Source image : Filckr –Force Ouvrière – Plénière CESE sur l’égalité sous creative commons
* Le nom a été modifié